Anthropia

Interview d'Hugues Lefebvre d'Anthropia

interview AnthropiaAlors rapidement, on sait que l'idée de création d'Anthropia est à la base un de vos projets personnels ; c'est vous qui avez tout mis en oeuvre pour monter votre propre groupe, c'est bien ça ? D'où vient le nom « Anthropia » ? Et dans quelles circonstances avez-vous rencontré les musiciens qui vous accompagnent actuellement ?
Bonjour ! J’ai en effet créé Anthropia en 2002-2003. C’était à la base un projet solo : je sortais d’une expérience de groupe de reprise et j’étais un peu lassé de jouer les morceaux des autres… J’ai donc commencé à composer des chansons de mon côté, et j’ai au final obtenu la démo de ce qu’allait devenir le premier album d’Anthropia. Voilà comment tout a commencé (rires). Plutôt que de passer des mois à rechercher des musiciens pour compléter la formation, je suis rentré directement en studio et ai enregistré la plupart des instruments. Ce n’est que lorsqu’il a fallu représenter cet album en live que j’ai commencé à chercher des musiciens. J’ai trouvé mon équipe assez facilement, car sur la côte d’Azur le rock et le metal sont des petites familles et tout le monde se connaît. C’est ainsi que j’ai recruté Nathalie Olmi au chant, Yann Mouhad à la guitare, Julien Negro à la basse, Damien Rainaud se chargeant déjà des batteries sur l’album. C’est tout naturellement que l’équipe est devenue un vrai groupe pour ce 2ème album, car nous nous entendons très bien, et ces musiciens sont vraiment exceptionnels.
En ce qui concerne le nom d’Anthropia, c’est un vestige de ma formation d’ingénieur électronique (rires). L’entropie est une notion que j’ai étudiée en cours de thermodynamique. Elle traduit la valeur de désordre d’un système à l’état microscopique, le plus inquiétant étant que cette valeur ne diminue jamais, elle ne fait que croître ! Je trouvais alors ça amusant de remplacer le préfixe par « anthro », l’ « homme » en grec, afin d’illustrer l’idée de désordre créateur humain.


Après le succès de votre premier album The Ereyn Chronicles Part One, on aurait pu éventuellement s'attendre à une « Part Two » mais au lieu de ça, vous débarquez le 16 février dernier dans les bacs avec The Chain Reaction, un album très réussi, qui défraie la chronique. Pensez-vous que les gens vous attendaient au tournant après le succès de votre premier opus ?
C’est vrai que le premier album avait déjà été très bien reçu, mais je n’ai pas eu l’occasion de « stresser » particulièrement au sujet du second album : environ 80% du disque était déjà composé lors de la sortie de The Ereyn Chronicles. C’est sur que l’on a toujours une appréhension lors d’aborder un nouvel album, savoir si les fans vont adhérer à la nouvelle galette du groupe, etc… Maintenant, les gens peuvent attendre au tournant, j’essaierai toujours de donner le meilleur de moi-même afin de délivrer le meilleur album possible !

Trois ans se sont écoulés depuis la parution de The Ereyn Chronicles Part One. Comment se sont déroulées ces trois années ? Il semblerait que vous ayez rencontré quelques difficultés avec votre label Magna Carta. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ? Y a-t-il eu une bonne entente au sein du groupe durant ces trois années ?
En ce qui concerne l’entente au sein du groupe, tout se passe à merveille ! Et pour avoir été dans plusieurs formations, je sais que c’est assez rare, je suis très fier de l’équipe d’Anthropia. En ce qui concerne Magna Carta, nous nous sommes séparés en partie pour cause de divergence musicale. Nous remercions néanmoins ce label pour nous avoir permis de sortir le premier album du groupe. D’autre part, nous avons toujours eu une âme d’indépendant, c’est donc avec plaisir que nous avons monté notre propre structure pour produire les albums du groupe. C’est ce qui s’est passé durant les 3 années séparant les 2 albums : la production du 2ème qui a pris un certain temps, mais également la création du label Adarca Records.

Ca n'a pas dû être facile tous les jours... En plus de tout ça, le départ de Marie-Eve Orango n'a pas dû arranger les choses. Pouvez-vous nous éclairer sur les raisons de son départ ?
Le premier album était réellement un projet solo, Marie-Eve apparaissait donc uniquement en tant qu’« invitée ». C’est une très bonne amie à moi que j’ai rencontrée à mes cours de chant et c’est tout naturellement que je l’ai conviée à participer &#
interview Anthropia224; l’album. Ensuite, elle n’est pas grande adepte de metal (sa musique privilégiée étant la soul), je pense qu’elle n’aurait pas été pleinement satisfaite en tant que membre officiel du groupe.

On a le sentiment, dans The Chain Reaction, que chaque musicien apporte sa touche personnelle, ce qui manquait un peu dans l'album sorti il y a 3 ans. Y a-t-il eu une sorte de participation générale dans les compositions ou avez-vous continué à composer seul comme dans le passé ?
La quasi-totalité de l’album étant composée, ils n’ont pas eu l’occasion de participer à l’écriture de l’album. Ceci étant, ils ont largement contribué à l’album par leur interprétation : je leur ai fourni la démo de l’album, et chacun a pu apporter ses idées pour des arrangements, ou même en améliorant certaines parties. Comme tu le soulignes, on sent vraiment une unité, une cohérence et une cohésion qui manquaient un peu dans le premier album.

Vous autoproduisez cet opus donc ; comment avez-vous réussi à permettre l'aboutissement de ce projet ? Avez-vous rencontré certaines difficultés particulières ?
A notre départ de Magna Carta, nous avons longuement réfléchi sur la marche à suivre. La crise du disque devenant de plus en plus présente et handicapante, le business va se métamorphoser à l’avenir. C’était notre avis sur le moment (et c’est toujours le cas !) et nous avons décidé de prendre les devants afin d’auto produire complètement le groupe. Nous sommes donc actuellement 100% indépendants, et d’après moi dans 10 ans, un gros pourcentage des groupes pro auront opté pour ce mode de fonctionnement. Bien sûr, tout n’a pas été de tout repos, le tout a demandé énormément de travail et d’argent, et je t’avoue que j’ai passé pas mal de nuits blanches ! (rires) Mais le résultat est là et ça en valait la peine. Puis l’expérience est passionnante !

Le fait de chanter en anglais vous ouvre-t-il une porte vers l'international ? Si oui, était-ce le but recherché ?
Effectivement, c’était une volonté initiale de pouvoir élargir notre public de façon conséquente. Chanter en anglais est bien entendu une aide considérable dans ce domaine. Ceci étant il n’est pas exclu que nous chantions quelques morceaux en français dans les années à venir ! Nous avons d’ailleurs incorporé un texte de Baudelaire en français sur le dernier morceau de The Chain Reaction, « Breeze in the Leaves ». Il s’agit du poème « Correspondances ». Certains ont adoré le mélange anglais/français, on renouvellera donc certainement l’expérience !

On ressent à l'écoute de certaines pistes, tel « Incarnation » ou « The Torn Off Wing Of The Butterfly » une certaine complexité des mélodies. Cela n'a pas dû être évident à enregistrer... Combien de temps avez-vous passé en studio ? Et dans quelles conditions enregistriez-vous ?
Ce qui a pris beaucoup de temps n’est pas tellement l’enregistrement, mais surtout le travail de pré-production, et en particulier l’écriture des nombreux arrangements. Avant d’entrer en studio, j’ai toujours un « brouillon » de l’album, une démo, avec déjà tous les arrangements, les parties chants, etc… C’est cette démo qui met plusieurs mois, voire une année à voir le jour. Ainsi l’enregistrement de l’album en lui-même n’a duré qu’un mois (au Artmusic Studio à Nice), le mixage 10 jours (chez François Merle du groupe Manigance), et le mastering 2-3 jours au Danemark au Jailhouse studio (tenu par Tommy Hansen, qui a entre autres travaillé avec Helloween).
Ensuite, il est certain que les morceaux d’Anthropia prennent beaucoup de temps à être composés, car je m’impose une certaine complexité dans ces morceaux, afin d’éviter tout effet de déjà vu chez les auditeurs.


Où puisez-vous l'inspiration qui vous a permis d'écrire les onze titres de l'album ? Exprimez-vous vos expériences personnelles, ou des faits de société ?
Cela dépend… en général, je commence toujours pas définir un concept précis, et un scénario pour l’histoire générale de l’album. Après avoir divisé ce scénario en une dizaine de chapitre représentants les moments les plus importants, je m’attelle à la composition des 10 chansons correspondantes. Le tout vient alors très naturellement, car je sais de quoi chaque chanson parle, et je peux alors m’inspirer des émotions resse
interview Anthropianties par les héros de cette histoire imaginaire. Bien sûr je ne me borne pas à cette méthode, des fois l’inspiration vient comme ça et il faut noter les idées tout de suite pour ne pas les oublier. J’ai par exemple eu l’idée de toutes les mélodies de « Take Me Home » lors d’une visite de la ville de Metz et de sa somptueuse cathédrale. J’ai enregistré ces mélodies sur mon téléphone portable (rires) car je savais que ça pouvait faire un très bon morceau en perspective.

Cet album est donc une œuvre 100 % metal, bien qu'une ballade (« Those Days Are Always Rainy ») apporte un petit instant de douceur vers la fin de l'album. Quel public comptez-vous viser avec cet opus ? Celui conquis avec Ereyn ? Ou peut-être ne ciblez-vous pas UN seul type d’auditeur en particulier ?
Pour être totalement franc, je ne pense pas à ce genre de choses… j’essaye simplement de faire un bon album avec une musique recherchée et des mélodies attrayantes. Mon avis est que si on a l’esprit suffisant ouvert, on peut apprécier toute sorte de musique (toutefois bonne évidemment (rires)) quel que soit son style de prédilection. Je ne vise donc pas de public particulier, j’essaye simplement de mettre en musique mes idées, qu’elles soient metal ou un peu moins (rires).

Vous représentez en quelque sorte l'avenir du metal progressif français. Comment vous sentez-vous vis à vis de la concurrence, assez nombreuse tout de même, et de plus en plus jeune ? Comment gérez-vous la notoriété acquise au cours des dernières années ? Les gens se retournent-ils dans la rue pour vous interpeller (sourire) ?!
Tout d’abord merci ! En fait, je ne vois pas les autres groupes comme de la « concurrence »… Le metal en France est une petite famille et je pense que nous devons nous serrer les coudes et tisser des liens. C’est un peu ce que j’ai voulu faire en faisant participer Kevin Codfert d’Adagio et François Merle de Manigance à l’album. Quant à notre notoriété, ma foi je te rassure, on peut encore faire nos courses tranquillement (rires). Je suis d’ailleurs plutôt quelqu’un de réservé, donc ça me convient parfaitement.

Une éventuelle tournée est-elle prévue dans les mois à venir ? Si oui, comptez-vous uniquement vous produire en France, ou également à l'étranger ? Et préférez-vous faire la tournée des Zenith et autres grandes salles ou plutôt vous sentir proche de votre public en jouant sur de plus petites scènes ?
En ce qui concerne les tournées nous y travaillons, mais je ne t’apprends rien en disant que le business de la musique connaît en ce moment une sale passe, et qu’il est très difficile de convaincre les tourneurs de miser sur un nouveau groupe. Nous organisons néanmoins des concerts dans notre région ainsi que des show cases acoustiques, dont les retours sont très bons ! Plusieurs vidéos live seront d’ailleurs mises en ligne d’ici la fin de l’année. Ma foi, pour la taille des scènes, notre préférence est assez variable… L’émotion ressentie n’est pas la même : la promiscuité du public est assez sympathique, car on a un contact visuel très clair avec l’effet opéré par notre musique sur les auditeurs ; ceci étant on se marre bien sur les grandes scènes aussi (rires).

Travaillez-vous actuellement sur un nouveau projet ? Un prochain opus est-il actuellement en préparation ? Comment voyez-vous l'avenir pour Anthropia ?
Nous finissons actuellement la promotion pour The Chain Reaction, mais nous avons effectivement déjà plusieurs projets en tête : notamment la sortie d’un mini album acoustique live d’ici la fin de l’année. Ensuite bien entendu, nous attaquerons le prochain album du groupe. On a hâte de s’y mettre !

Enfin, quel conseil pouvez-vous donner à tous ces jeunes groupes qui tentent, parfois vainement, de rejoindre la scène rock-metal française ? Quelle est, en quelque sorte, la formule magique pour réussir, selon vous ?
Je donnerai simplement ce conseil : n’attendez pas qu’on vienne vous chercher. Bosser beaucoup, enregistrez vous-même votre album (on vit à une époque où c’est largement possible), sortez-le etc… L’industrie du disque est en plein renouveau, et c’est aux bosseurs que l’avenir musical s’ouvrira !

Et pour finir, un petit mot pour les lecteurs de Spirit Of Rock ?
Et bien merci à tous d’avoir lu cette interview jusqu’au bout ! Nous sortirons bientôt un clip sur la chanson « The Altar Of Trust », j’espère qu’il vous plaira !

interview réalisée par Marc-Antoine Lainé

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