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Biographie : Marillion

Marillion est un groupe de rock britannique parfois rangé sous la banière « rock progressif », né en 1978 sous le nom de Silmarillion d\'après l\'œuvre inspirée par J.R.R. Tolkien, auteur du Seigneur des anneaux. Le nom est vite raccourci à Marillion, tandis que le groupe s\'éloigne peu à peu de toute référence « folklorique » (à l\'imaginaire tolkiéniste, au rock progressif des années 1970) pour développer une identité propre, caractérisée par les textes, la voix et la prestation scénique du chanteur Fish, puis de son successeur Steve Hogarth, parfois considéré comme moins charismatique, mais tout aussi talentueux.

Facilement qualifiée à ses débuts de « clone de Genesis », la recherche mélodique qui caractérise le groupe alliée à la rage de son chanteur Fish lui vaut les grâces du public, conquis en 1985 par le single Kayleigh extrait de l\'album Misplaced Childhood, concept album à caractère autobiographique. Cette première période culmine en 1988 avec le très réussi Clutching at Straws, et le départ de Fish. À partir de 1989, une seconde période verra la mise en œuvre d\'un son parfois plus pop-rock, parfois plus sombre (Brave, en 1994). La troisième (et actuelle) période débute en 1997, tandis que le groupe se sépare d\'EMI pour passer en autoproduction. C\'est une période en demi-teinte d\'un point de vue commercial, mais très riche musicalement, malgré un aspect parfois inabouti (Radiation, Marillion.com), heureusement dépassé par les derniers albums du groupe et en particulier l\'excellent Marbles sorti en 2004.


Première période : Débuts du groupe et consécration (1979-1988)

Le groupe tourne dans les clubs au début des années 80 et notamment au Marquee Club de Londres où ils affichent complet. Ils jouent de long morceaux comme The web ou Grendel qui approche les 18 minutes. D\'après Steve Rothery, c\'était « une époque où on ne savait pas comment finir les morceaux ! ». La proximité de style entre ces premiers morceaux et certains morceaux phares du rock progressif des années 1970 leur vaut d\'être catalogué « ressuscitée de Genesis » par certains critiques. Cette critique persiste encore aujourd\'hui, et on a pu la voir fleurir au gré de certaines chroniques de l\'album Marbles, ce qui ne démontre que l\'absence de sérieux de certains chroniqueurs : si les premiers morceaux du groupe se rapprochent du son Genesis, dès les premiers albums le groupe marque son individualité et son originalité.

Leur premier single Market Square Heroes, beaucoup plus classique, rencontre un bon succès. Il précède leur premier album Script for a jester\'s tear sorti en 1983, dont la pochette dessinée par Mark Wilkinson utilise pour la première fois une symbolique chère à Fish : celle du « jester », le bouffon, qui désigne l\'artiste/interprète/auteur, personnage maître du mensonge et de l\'illusion. On retrouve là une critique de l\'art en général et de la fiction en particulier chère au vingtième siècle, ainsi qu\'un reflet du manque d\'assurance de Fish dans son rôle d\'auteur/interprète, manque d\'assurance fort heureusement peu justifié. La pochette présente aussi divers éléments symboliques sous la forme d\'une pie voleuse et d\'un caméléon, que l\'on voit écrire les paroles de Yesterday des Beatles. Du point de vue de la musique, le son du clavier dénote une certaine influence celtique qui durera jusqu\'au départ de l\'écossais Fish.

Fugazi sort en 1984. Cet album séduit aussi les amateurs de hard rock par des titres très incisifs comme Assassing ou Punch et Judy.

Le 3ème album studio en 1985 est celui de la consécration. Enregistré à Berlin, Misplaced Childhood se place en tête des ventes au Royaume-Uni, principalement grâce au succès des singles Kayleigh (que l\'on retrouve dans nombre de compilations commerciales britanniques de tubes des années 80), et Lavender. Ce succès reste néanmoins remarquable, surtout si l\'on considère qu\'il s\'agit d\'un album concept sur l\'enfance, « a priori » difficile d\'accès.

L\'album suivant verra le jour difficilement et sonnera le glas de la participation de Fish. Très marqué par les problèmes d\'alcool de ce dernier, Clutching at Straws est un album très sombre. C\'est également un album concept (le deuxième du groupe), qui met en scène un personnage nommé « Torch », écrivain alcoolique en mal d\'inspiration et de création, sorte de double de Fish. Sorti en 1987, il reflète les tensions entre les membres du groupe. Après la tournée, Fish quitte le groupe pour une carrière solo et le reste du groupe recrute Steve Hogarth pour le remplacer.


Seconde période : Changements et continuité (1989-1996)

Ils sortent Season\'s end en 1989, puis Holidays in Eden en 1991, deux albums qui marquent un tournant assez « pop » dans le style du groupe, bien que cette tendance ne soit pas nouvelle (on pensera à Kayleigh et Lavender, fers de lance du succès du groupe auprès d\'un très large public au Royaume-Uni). Même les morceaux les plus ambitieux musicalement du groupe ne s\'articulent plus vraiment autour des ruptures de rythme chères au rock progressif des années 1970, mais plutôt autour de rythmes lents (voire contemplatifs) qui montent en crescendo avant d\'exploser avec retenue. À l\'exubérance de Fish succède la rage contenue de Steve Hogarth, et le changement n\'est finalement pas si radical, l\'évolution musicale du groupe se faisant toujours avec une certaine cohérence.

1994 voit le retour de Marillion au concept-album avec le très ambitieux Brave, album inspiré d\'un fait divers (dans les années 80, la police avait retrouvé sur le pont de Severn à Londres une jeune fille d\'environ 20 ans, perdue et apparemment amnésique, ou du moins peu loquace). L\'idée de l\'album vient de la rencontre de deux chansons (alors en projet) qui comptent dans leur version finie parmi les meilleures de l\'album, Living with the big lie (écrite par Hogarth) et Runaway (écrite par John Helmer). Hogarth se rend compte que les deux chansons évoquent un même sujet, dit « teenage angst » (le mal-être adolescent), et fait le lien avec ce fait divers. Il décide de l\'extrapoler en imaginant ce qui a pu se passer avant l\'arrivée de cette jeune fille sur le pont. Au final, il s\'agit d\'une œuvre extrêmement sombre, la musique du groupe venant accompagner et réhausser à merveille les textes (et inversement), un album concept dont la trame narrative est parfois opaque, mêlant intimement différentes voix auxquelles Hogarth prête la sienne : celle de la jeune fille, celle de son amant, celle du narrateur extérieur.

Afraid of Sunlight est la dernière collaboration de Marillion avec EMI en 1995. Il s\'agit encore (et pour la dernière fois à ce jour dans l\'histoire du groupe) d\'un album concept, non pas axé autour d\'une même trame narrative, mais autour d\'une unique trame thématique : celle des dangers du succès (ironie peut-être involontaire en cette période où le groupe amorce une lente mais nette descente du point de vue du succès commercial). Hogarth y démontre son talent à se mettre dans la peau d\'un autre personnage, ne parlant jamais mieux de lui que lorsqu\'il parle des autres (de Brian Wilson dans Canibal Surf Babe, du dans Out Of This World). La musique du groupe y est moins sombre que dans Brave, s\'apparentant à ce qu\'on qualifie parfois de pop « intelligente » ou « ambitieuse », voire de « pop prog » (par analogie avec le « rock progressif »). Le groupe y affirme surtout son intention de ne pas se laisser enfermer dans une catégorie musicale quelconque, intention qui sera plus pleinement mise en œuvre dans les albums suivants.


Troisième période : Autoproduction et recherche musicale (1997-2004)

Le groupe quitte donc EMI après Afraid of Sunlight (ils avaient pensé le faire plus tôt, lors de la préparation de Brave, mais avaient finalement décidé d\'aller au bout de leur contrat banalement abusif - signé pour 7 albums, taux de royalties faible et non renégociable). Le groupe créera donc Racket Records, son propre label indépendant (qui ne s\'occupe que de Marillion, du moins pour l\'instant), et sera distribué pendant un temps par Castle. À partir de 2001, le groupe est toujours en autoproduction, mais retire la distribution à Castle pour la confier à… EMI. N\'étant pas dépendant d\'EMI pour la production de ses albums, ou les relations avec ses fans, le groupe sort donc vainqueur de cet échange parfois difficile à suivre.

À partir de 1997, avec This Strange Engine et par la suite, le groupe rencontre un succès confidentiel selon les standards de la musique radio- et télé-diffusée en « heavy rotation » (matraquage), mais suffisamment important pour garder le groupe sur les rails et lui assurer une indépendance de création enviée par nombre de groupes à travers le monde n\'ayant pas la chance de disposer d\'une base de fans solide de plusieurs dizaines de milliers de personnes. Le groupe développera une stratégie de communication plus directe avec ses fans, via Internet, comprenant en cela où était leur véritable force. Ils n\'hésiteront pas à faire appel, financièrement, à ceux-ci, d\'abord pour l\'organisation d\'une tournée américaine après de la sortie de l\'album Marillion.com (l\'initiative de collecte de fonds avait été lancée par un fan américain, et largement suivie via les listes de diffusion sur internet), ou encore pour pouvoir produire l\'album Anoraknophobia (2001), ou constituer un budget promotionnel pour l\'album Marbles (2004). Nombre de fans se prêtent de bonne grâce à cette forme de soutien direct, qui de plus donne le plus souvent droit à une version « collector » de l\'album, spécialement réservée aux précommandes.

Les albums de cette période (1997-2004) sont par certains côtés plus novateurs que des précédentes productions du groupe, et cette recherche dans la démarche du groupe, pas toujours accompagnée d\'une réalisation ou d\'une maturation suffisante, déçoivent une partie des fans de la première heure. On pensera aux deux albums Radiation (1998) et Marillion.com (1999), composés dans une même foulée et sortis peut-être à la va-vite. Le son en particulier est assez mauvais, ce qui est principalement dû au mixage non seulement noisy (ce qui aurait pu être une évolution intéressante dans le son du groupe) mais aussi manquant cruellement de profondeur, en particulier dans les basses fréquences. Les compositions sont pourtant très bonnes, et si l\'on pense au succès à la fois technique et artistique du double album « Marbles » sorti en 2004 (trois ans de gestation), on en vient à regretter que le groupe n\'ait pas pris le temps (ou n\'ait pas pu le prendre) pour composer, enregistrer et mixer convenablement un double album, ou bien un simple assez dense, un hypothétique « Radiation.com ». On peut aussi regretter l\'absence du producteur Dave Meegan, collaborateur du groupe sur tous ses meilleurs albums de la période Hogarth, Brave et Afraid of Sunlight, ainsi que Anoraknophobia et Marbles.

Anoraknophobia sort en 2001 après les mal-aimés Radiation et Marillion.com, et c\'est un album rassurant pour les fans. C\'est pourtant un album encore plus novateur que les deux précédents, le groupe s\'essayant à des sonorités et des compositions qu\'on ne lui connaissait pas vraiment, sans pour autant se détourner totalement du « son Marillion ». La forte cohérence de cet album est sans doute due au travail de Dave Meegan, producteur consciencieux mais véritable chef d\'orchestre du groupe en studio, capable de faire recommencer une prise autant de fois que nécessaire, ou de renvoyer Steve Hogarth retravailler sur ses paroles. Les décisions se font le plus souvent de manière démocratique, mais le groupe apprécie ce jugement un peu plus extérieur et non complaisant. Au final Anoraknophobia est un bon album, moins apprécié que certains classiques du groupe par les fans, mais qui se bonifie avec le temps.

Après trois ans d\'attente le groupe sort un double album (1h40 de musique) intitulé Marbles, constitué de diverses chansons toutes très bonnes mais parfois assez différentes. Le facteur liant est la dissémination à travers l\'album de petits morceaux de transitions intitulés Marbles I, II, III et IV. Cela ne suffirait pas à donner une impression d\'ensemble, effet qu\'a toujours recherché le groupe (qui considère chaque album comme un tout, qu\'il s\'agisse d\'un album concept ou d\'un album de facture classique, et non pas comme une compilation de nouvelles chansons), s\'il n\'y avait pas ce « son Marillion » très reconnaissable même entre deux titres très différents, son pour lequel on ne sait s\'il faut créditer les musiciens du groupe, la voix et l\'interprétation de Steve Hogarth, ou le travail de Dave Meegan. La réponse la plus sensée est : les trois. D\'une qualité indéniable, cet album (accompagné d\'une campagne marketing financée par les fans) reconquiert à la cause du groupe une partie des fans de la première heure qui avaient perdu de vue le groupe, ainsi peut-être qu\'un certain nombre de nouveaux fans, mais il est trop tôt pour le dire. Il est ponctué de temps forts comme le désormais classique The Invisible Man, morceau de 13 minutes d\'une cohérence étonnante, peut-être la plus grande réussite du groupe dans ce type de format (le groupe excellant d\'habitude dans des formats moyens de 5 à 9 minutes).

Source : http://www.amarokprog.net/biographies_46_590.html