Plume Latraverse : Chansons Nouvelles

Folk Rock / Canada
(1994 - Disques Dragon)
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1. INTRO HIT

(Instrumental)


2. SIX MOINEAUX

Tête à pied, dos à dos
Sans papiers, sans photo
Mine de rien, fil de l'eau,
Galérien à l'avenir manchot

Blues dans l'œil, jusqu'au cou
Seuil à seuil, bout à bout
Fuite du temps, heure floue
Panne de vent et grands nuages à trous

Ciel fendu qui sommeille
Étendu au soleil
Mal fichu, bonne bouteille
Âme des rues que la noirceur réveille

Tête à pied, dos à dos
Sans papiers, sans photo
Sans bagage, there we go!
Bon voyage, six moineaux.


3. IMMATÉRIELLE DAYNISE

Daynise, immatérielle Daynise…

Sur notre pauvre planète,
Où la vie n'est pas nette
Les jours de mal de mer,
Quand le temps est amer
Chacun s'ennuie d'sa mère

Qui est notre port d'attache,
Chaque fois qu'on en arrache?
Qui est notre Madone,
Celle qui nous pardonne
Vers qui on s'abandonne?

Qui nous ouvre sa porte,
Chaque fois qu'on nous déporte
Qui ne demande rien
À nous pauvre terrien
Ingrats et bon à rien?

Qui nous donne à manger,
Quand on est étranger
Qui règle la rançon
Pour le prix d'une chanson
Qu'on chante à l'unisson?

C'est Daynise, c'est notre belle Daynise Caron
La fée d'notre cabane en bois rond
Celle qui nous prend sous son aile,
Qui nous garde près d'elle
Daynise Caron!

Qui c'qui lave la vaisselle,
Qui s'qui sort les poubelles?
Qui c'qui fait le ménage,
Qui c'qui fait nos bagages
Quand on part en voyage?

Qui c'qui tient la maison,
Quand on est en prison?
Qui c'qui prend soin de nous,
Nous prend sur ses genoux
Quand notre gorge se noue?

Qui c'qui nous rend joufflus,
De p'tits rien superflus?
Qui nous rend adipeux,
Qui nous rend sirupeux
Nous qui mourons de peu?

Qui remplit notre coupe,
Avec sa bonne soupe
Qui nous soûle de son vin,
De son croûton divin
Nous fournit le levain?

C'est Daynise, c'est notre belle Daynise Caron
La fée d'notre cabane en bois rond
Celle qui nous prend sous son aile,
Qui nous garde près d'elle
Daynise Caron!

Qui abreuve les miteux,
Avec des mots juteux
Sortant d'sa bouche en fraise,
Qui c'qui nous met à l'aise
Nous enlève nos prothèses?

Qui fait un vrai poème,
De notre vie d'bohême?
Qui inspire notre clan,
Nous protège sur son flanc
Nous presse sur son sein blanc?

Qui partout à la ronde,
Est la blonde à tout l'monde
Qui même si elle se donne,
N'appartient à personne
Et s'prend pas pour une bonne

Qui ravive les braguettes,
Rallume les cigarettes
Qui ouvre grand ses cuisses
À chacun dans l'hospice
Pour offrir ses délices?

C'est Daynise, c'est notre belle Daynise Caron
La fée d'notre cabane en bois rond, rond, rond, rond
Celle qui nous prend sous son aile,
Qui nous garde près d'elle
Daynise... Caron!


4. CAHIN-CAHA (TARAPÂPU!)

J'me d'mande parfois j'me d'mande souvent
Dépendant d'comment vient le vent
Quand accoudée au bastingage
La mémoire déballe son bagage

Et que le temps ce vieux forçat
Labourre son grand champs de remords
J'me d'mande comment t'aurais pris ça
Caïn, si tu n'était pas mort?

Toi qui r'luisais comme un blasphème,
Toi qui était l'anarchie même
Le front cinglé au mal d'amour
Se meur de trouble, gueulard, balourd

Toi qui crachait ton malheur essaimé
Quand le bonheur nous infestait
Je crois t'avoir un peu aimé
Parce que les autres te détestaient...

C'est tout comme s'il y avait des gens
Pour qui la vie est indigeste
C'est tout comme s'il y avait des gens
Qui sont p't être mieux morts qu'indigens!

Il y a du temps qu'il faut cueillir
Car il n'est pas fait pour veillir
T'était pas fait pour vivre longtemps :
Tu as étiré tes vingt ans

Avec ta démarche incertaine
T'aurais pas pu, je le répète
Poigner la courbe de la trentaine
Sans que tes bretelles ne pètent

Ce train qui délaisse l'âge tendre
N'a pas pri le temps de t'attendre
Tu s'rais resté su l'quai d'la gare
À voir les années qui s'égarent

T'es p-t'être aussi ben d'être mort, mon vieux!
J'sais pas c'que t'aurais pu dev'nir
T'aurais eu d'quoi t'sentir envieux quelque part,
T'avais pas d'av'nir!

C'est tout comme s'il y avait des gens
Pour qui la vie est indigeste
C'est tout comme s'il y avait des gens
Qui sont p't être mieux morts qu'indigens!

Tiens, Je vais t'donner des nouvelles
Attends que j'tourne la manivelle
Un tel qui était si débonnaire
Est devenu un fonctionnaire

L'autre qui ne marchait pas au pas
Qui se soûlait comme un débile
Est retourné voir son papa
Pour vendre des automobiles

Celui qu'un grand souffle animait
Tellement qu'il jurait que jamais
On n'le tourn'rait en dérision
Fait l'trèfle à la télévision

D'autres ont vraiment tout arrêté
Déjà qu'ils n'en m'aient pas trop large!
Ont fini en parfaits ratés
Et vivent encore plus dans la marge...

C'est tout comme s'il y avait des gens
Pour qui la vie est indigeste
C'est tout comme s'il y avait des gens
Qui s'raient p't être mieux morts qu'indigens!

Nous, on n'est pas trop dispersés
On s'tient toujours loin, comme tu sais
Des grands boul'vards d'la réussite
C'est pas les mode qui nous excitent

T'es mort dans nos années flyées
Pis aujourd'hui t'es mort de rire
Caïn, tu va nous faire brailler...
Pis dire qu'on pouvait pas t'souffrir!

On s'est gardé un coin d'bohème
Pour se chatouiller le système
On trinque encore sous le même toît
Et puis, les fois qu'on parle de toi

On se dit, sans aucun remords...
Tu vois comme on est corrompus
On s'dit qu'dans font,
T'es ben mieux mort
Caïn, parce que Tarapâpu!!!


5. LES PATINEUSES

Avec son coat en minou bleu,
Son foulard rouge, son béret noir
Était comme un bouquet frileux
Au milieu de la patinoire

Moi, j'patinais sur la bottine,
Était-ce elle qui m'éblouissait?
Était-ce le décor qui glissait?
J'avais les jambes en gélatine
Je n'en croyais pas mes rétines
Et j'en perdais tout mon français

Le vent emporta son béret et
Déploya ses longs cheveux
Elle dut marquer un temps d'arrêt
Et j'eus le temps de faire un vœu

Que son béret vole jusqu'à moi,
Que je puisse mieux voir sa frimousse
Que je me porte à sa rescousse,
Qu'on se regarde avec émoi
En souhaitant que le vent me pousse
Moi qui patine comme une oie

Le béret soufflé dans les airs,
Semblait ne plus vouloir tomber
Je patinais tout de travers
En le voyant se dérober

Était-ce le hasard qui voulut
Faire preuve de haute précision?
Lorsque j'entrai en collision
Avec la belle chevelue
Exécutant pour l'occasion
Un acrobatique salut

Étendu parmi les étoiles,
Foudroyé à deux minutes près
Quand le vent releva le voile
Et fit retomber son béret…

Me suis perdu dans ses yeux d'ange,
Et pendant un instant, heureux…
Comme lorsque l'on tombe amoureux,
Ce moment de curieux mélange
Où tout est tellement doucereux
Que vraiment rien ne nous dérange

Toutes ces fées sur qui l'on tombe
Et dont le secret nous attire
Qui nous font l'effet d'une bombe
Et qu'on laisse pourtant repartir

Dans des circonstances nébuleuses
Sans même de contact établi
Et qui glissent vers notre oubli
Parmi nos amours en veilleuse
Sur des patinoires remplies
De toutes ces belles patineuses…


6. REVIREMENT MAJEUR

Lui qui était si délinquant
Et si voleur
Et qui foutait un tel boucan
Quand de malheur

Lui qui retroussait les bourgeois
Et les jupons
Et qui allait cracher sa joie
Comme un fripon

A fini par muer
Malgré tous ses travers
Se sent même remué
Quand son chien fait des vers

Il courtise la justice
Et le fric sans odeur
Et appelle la police
Quand il voit des rôdeurs

Lui qui était si assommant
Et si rocker
Avec ses fichus instruments
D'enfant de chœur

Lui qui bombardait ses tourments
Aux décibels
Qui portait des accoutrements
Plein de bebelles

A fini par mûrir,
Comme une grappe de raisins
A fini par surir
À cause de ses voisins

Retiré en coulisse,
Caché derrière sa porte
Il appelle la police
Quand la musique est forte

Lui qui était tellement soûlon,
Tellement buveur
Lui qui s'maganait le côlon
Avec ferveur

A dû se résoudre pour des
Raisons de santé
À marquer un sérieux arrêt
Et à se canter

A fini par être sobre,
En sombrant dans le jeune
Et sans aucun opprobre
Fait la morale aux jeunes

Quand un ancien complice,
Pisse sur son gazon
Il appelle la police
Pour qu'on l'foute en prison

Lui qui aimait tant courailler,
Lui si noceur
Lui qui aurait même pu farfouiller
Avec sa sœur

Lui qui était à son meilleur
Dans l'tripotage
S'voit réduit à être un voyeur
De bas étage

Profite de l'altitude,
D'la fenêtre de sa cuisine
Surveille les habitudes
De la fille de sa voisine

Relève tous les indices,
Qui peuvent le déranger
Et appelle la police
Pour prévenir le danger

Lui qui était si ratoureux
Dans la noirceur
Du temps qu'il était moins peureux
Et plus fonceur

Lui qui cachait toutes ses chimères,
Sous son écorce
Lui qui clamait que l'éphémère
Était sa force

Qui jetait l'anathème
Sur tout ce qui reluit
En fuckant le système
Pour tuer le bourgeois en lui

Sans porter préjudice
À sa réputation
Il appelle la police
Pour des informations

Lui qui était si insolent
Et si bêta
Qu'on lui aurait battu les flancs
Sans résultat

Aujourd'hui tout ça le meurtrit,
Lui casse la tête
Serait-ce parce qu'il aurait trop ri,
Trop fait la fête?

Aurait-il oublié,
L'énergumène qu'il fut?
Est-ce le prix à payer
Pour tout ses vieux refus?

Prix qu'il doit renchérir,
Sans la moindre riposte
Chaque fois va quérir
Son propre fils au poste


7. QUELLE HISTOIRE!

Alors que je m'entasse
Au comptoir d'un bistrot
Pour me payer une tasse
Une dame rapplique au trot

Et se plaint au garçon
Quelle a perdu son sac
Je le trouve sans façon
Lui rend du tac au tac

La voilà qui m'accuse,
Me jette des regards
Alors moi, je récuse
Avec mon air hagard

L'affaire tourne au conflit,
Je suis dans de beaux draps...
J'ai voulu être poli,
Eh ben ça m'apprendra!

Les clients me constatent
Et le patron aussi
Je frétille sur mes pattes
Et ça sent le roussi

Voilà que la bonne dame
Explique c'que j'n'ai pas fait...
Le conflit tourne au drame
Et je suis contrefait

Je n'ai plus d'autre choix
Que d'fuir comme un voleur
Comme un sans foi ni loi
Sans grand sens des valeurs

La prochaine fois je vais
Laisser les choses par terre
Les gens sentent trop mauvais
Quand ils sont au parterre

Je m'éloigne à grands pas
Du lieu de mes déboires
Y faudrait quand même pas
Que je laisse un pourboire

Je marche prestement
Sans me faire remarquer
À n'importe quel moment,
On peut s'faire arnaquer

Tiens! déjà dans mon dos,
Un intrus me harcèle
Je sens comme un fardeau,
Comme si j'avais une selle

Il me crie par la tête...
Qu'est-c'que j'ai encore fait?
Faut-il que je m'arrête
Pour constater les faits?

Voici qu'il me rejoint,
La main sur mon collet...
Va-t-il m'offir un joint
Ou bien un pistolet?

Je me retourne prêt À
Faire face à la musique
J'suis dans tous mes états,
Tant mental que physique

L'homme qui me talonnait
En me faisant courir
Me tend mon porte-monnaie,
Armé d'un grand sourire:

"Vous l'aviez échappé,
Là-bas sur le trottoir
Mais pour vous rattraper...
Alors là quelle histoire!"


8. L'ANGE EXTERMINATEUR

Je serais peut-être le plus fasciste
Peut-être aussi le moins raciste
Justicier plus que dictateur
Si pour une raison comme celle-là
J'étais appelé à porter la
Toge de l'ange exterminateur

Je serais sans doute indulgent
Pour le fraudeur intelligent
Tant qu'il n'y a pas de trahison
À moins qu'il n'soit politicien
Alors là je serais stoïcien
Et je le foutrais en prison

Ainsi parlait déterminé
Un pur petit illuminé
Débalancé par la justice
Qui se prenant pour Salomon,
Voulait confondre le démon
Devant ses propres cicatrices
Je comprends qu'on puisse voler
Je suis un ange olé! Olé!
Mais je suis un ange qui raisonne

Formalité d'absolution :
On peut voler à condition
De ne faire de mal à personne
Quand on tue un vieux sans défense
Pour quelques billets qu'on dépense
Ou bien qu'on roule dans son nez
Ne me parlez pas de remords
D'abolition d'la peine de mort
Ceux-là sont déjà condamnés…

Ainsi parlait déterminé
Un pur petit illuminé
Débalancé par la justice
Qui se prenant pour Salomon,
Voulait confondre le démon
Devant ses propres cicatrices
Je pourrais être impitoyable
Devant le crime inexpiable
Et l'inutile provocation

Le chauffard plein de robustesse
Qui remonte la rue à toute vitesse
Irait au camp d'concentration
Je frapperais la médiocrité
Les vendeurs de débilité
Les magouilleurs les plus féconds
Débarassés des cas subtils
Hélas, combien en resterait-il
Pour pouvoir crier : mort aux cons!

Ainsi parlait déterminé
Un pur petit illuminé
Débalancé par la justice
Qui se prenant pour Salomon,
Voulait confondre le démon
Devant ses propres cicatrices

Si j'comprends bien qu'on puisse voler
Je comprends moins qu'on puisse violer
Voilà un pointilleux domaine!
Je sais qu'il y a des mammifères
Avec lesquels y'a rien à faire
Qui sont comme de la scrap humaine

Je porterais très haut mon glaive
Devant ces épandeurs de sève
Et je leur couperais la queue
Puis je leur couperais la tête
Pour couper court à toute requête
Et à tout retour belliqueux

Ainsi parlait déterminé
Un pur petit illuminé
Débalancé par la justice
Qui se prenant pour Salomon,
Voulait confondre le démon
Devant ses propres cicatrices

Toute cette race poutine immuable
Qui coûte cher aux contribuables
Et qui gangrène la garnison
N'échapperait pas au saccage
Ensuite je referm'rais la cage
Pour m'envoler vers l'horizon

Je serais peut-être le plus fasciste
Peut-être aussi le moins raciste
Mais j's'rais sûrement à la hauteur
Si, pour dire comme ce mauvais drôle
J'avais un jour à jouer le rôle
Du grand ange exterminateur


9. LE LAC MUTLICOLORE

Qu'as-tu fait du bonheur d'être couché dans la neige?
Observer des nuages l'artistique manège
Voir dans une flaque d'eau un lac multicolore

Qu'as-tu fait des petits riens
Que l'enfance dore?

Qu'as-tu fait de l'immense chasseur de papillons
Soulevant des montagnes pour trouver des grillons
Quand le moindre caillou pouvait être un trésor

Qu'as-tu fait des petits riens
Que l'enfance dore?

Qu'as-tu fait des fantômes de cette mare céleste?
Hors de toi ils ont fui sans demander leur reste
Il ne te reste plus qu'une flaque d'eau qui dort

Qu'as-tu fait des petits riens
Que l'enfance dore?

Qu'as-tu fait de tout ça, frère de tous les jours?
Toi qui avait juré que ça durerait toujours
Où sont donc les rumeurs que le soleil adore?

Qu'as-tu fait des petits riens
Que l'enfance dore?


10. LES QUATRE VÉRITÉS

Écrabouillées entre le mur de la bêtise
Et celui non moins triste des lamentations
Perdues dans l'abondance et la consommation
Quatre vérités faisaient un petit strip-tease

Elles dévoilaient tout pour se donner bonne conscience
Tout le surplus de gras qu'elles avaient dans la tête
Avec immodestie, muettes d'impatience
N'étant pas bonne à dire, toute vérité est bête

Et par un lancinant besoin de pureté
Victimes malgré elles du confort imbécile
Tissu de mensonges qui les garde en sûreté
Dans un monde où les murs sont d'une telle dureté
Qu'ils offrent une façade à la mollesse futile
Les vérités dansaient à huit clos dans leur île


11. 1837

Si vous me croisez un de ces matins
Pis qu’vous filez pour m’faire votre baratin
Vous pouvez me dire que j’ai une belle taille
Ou de splendide cheveux de bataille
Vous pouvez demander pour qui je vote
Vous pouvez demander pourquoi je rote
Il n’y a qu’une question qui m’empissette :
Où donc étais-je en dix-huit cent trente-sept?

Venez pas m’conter vos histoires d’amour
L’amour, l’amour, l’amour, la maudite mour
Ne m’posez pas d’questions sur le hockey
Parlez pas d’politique pis c’est O.K.
Qui parmi vous est assez visionnaire
Pour m’aider à remplir mon questionnaire
Qui donc élucidera la devinette :
Où donc étais-je en dix-huit cent trente-sept?

Moi qui trouve qu’il n’y a rien de plus poétique
Qu’une femme facteur qui trimballe sa boutique
Qui va de porte à porte à petit pas
Moi le simple d’esprit qui ne vieillis pas
Au lieu de m’dire toutes sortes de balivernes
De m’raconter des histoires de taverne
Dites-moi plutôt la réponse que je souhaite :
Où donc étais-je en dix-huit cent trente-sept?

Moi le vieux nonchalant de l’infini
Qui traîne un fond d’histoire indéfini
Jusqu’où mon esprit clairvoyant ondule
En ne rencontrant que des incrédules
Je vous demande de vous approfondir
Si vous n’avez pas grand-chose à me dire
Faites un effort, servez-vous d’vos lunettes
Où donc étais-je en dix-huit cent trente-sept?

Docteur, ne vous en faites pas pour autant
Parce que dans l’fond d’ma tête ça parle tout le temps
Il y a longtemps que j’ai pris l’habitude
Des voix qui poussent dans ma solitude
À travers toutes les grandes questions
Qui hantent ma salle de répétitions
Il y a cette voix qui toujours me répète
Où étais-tu en dix-huit cent trente-sept?

Où étais-tu en 1837… Où étais-tu en 1837…
Lâcheux !!


12. QUAND ROUSSEAU...

Quand Rousseau r'vient du chantier,
C'est comme s'y sortait du bagne
On astique nos dentiers
Pis on débouche le champagne

Travaillé toute la semaine
Dans le plâtre pis le bran d'scie
Quand le vendredi s'amène,
A l'air de sortir de Russie

A travaillé dans les caves,
Dans la bouette pis dans le roc
A tellement soif qu'il en bave
De descendre une couple de bocks

Quand Rousseau r'vient du chantier,
C'est comme s'y sortait du bagne
On astique nos dentiers
Pis on débouche le champagne

A fait des bosses dans les murs,
Des trous d'esprit dans les portes
Est blindé comme une armure,
Pour faire des jobs de toutes sortes

S'il n'avait pas d'employés,
Qui le poussent à la négoce
Oublierait d'se faire payer,
Pis y partirait sur la brosse

Quand Rousseau r'vient du chantier,
C'est comme s'y sortait du bagne
On astique nos dentiers
Pis on débouche le champagne

A travaillé dans les mines,
A travaillé sur les ponts
A combattu la famine,
C'est sa soif qui en répond

Quand arrive la fin de semaine,
Il grimpe jusqu'au paradis
Et par le même phénomène,
S'laisse descendre jusqu'au lundi

Quand Rousseau r'vient du chantier,
Les anges dans nos campagnes
Astiquent leurs dentiers
Pis ils débouchent le champagne

Di de li…Rousseau!


13. LA BALLADE EN RADEAU

Au cou de la bouteille
C'est le début de l'aventure
La soif jusqu'aux oreilles
De grands vents et de goût nature

L'expédition farouche
Sur le grand lac multicolore
Le désir plein la bouche
Et le miracle plein le corps

À l'épaule d'la bouteille,
La raison se met d'la partie
On s'tortille les orteils
Et on s'tortille les parties

Tant que le lac est clair
Notre joie pousse le radeau
Arrive un changement d'air,
On prend la bouteille par le dos

Et c'est le corps à corps
La bouteille est moitié moitié
Et l'on s'obstine encore…
Oui, mais le temps est sans pitié

Sur le radeau qui tangue,
Bientôt la tempête se lève
Quand on se tourne la langue,
On ne voit presque plus la grève

Et l'on touche le fond en criant
Au secours, on m'aime!
On affronte le typhon
Et l'on se noie dans un poème

On déserte le radeau
Et au bout de tout nos amours
Flotte la bouteille à l'eau,
Vidée de son sens de l'humour


14. SI...

Si t'avais été torero
Si t'avais eu des pectoraux
Si t'avais tout eu du héros
T'aurais-tu été moins heureux pour ça?

Si t'avais eu beaucoup de fric
Si tu t'étais appelé Éric
Si t'avais eu l'foie comme un brique
T'aurais-tu été moins heureux pour ça?

Si t'avais eu une grosse auto
Si t'avais pu voir le poteau
Si t'avais perdu la loto… wo-ho
T'aurais-tu été moins heureux pour ça?

Si t'avais eu plus de misère
Si t'avais été moins sincère
S'tu t'étais pas appelé Rosaire
T'aurais-tu été moins heureux pour ça?

Si t'avais possédé la terre
Si t'avais pas eu d'locataire
S't'étais resté célibataire
T'aurais-tu été moins heureux pour ça?

Si t'étais pas un imbécile
Si t'avais eu un domicile
T'aurais pas fait cinq ans d'asile… iile
T'aurais-tu été moins heureux pour ça?

Si.. si... si... si. si. si..........

Si t'étais né à Istambul
Si ta femme avait eu trois boules
Si a s'était appelée Raoul
T'aurais-tu été moins heureux pour ça?

Si t'as pas pogné le scorbut
Si t'as pas scoré quatre cents buts
Si t'as pas fait tous les abus…
Y faut pas être moins malheureux pour ça!


15. LE TAPIS VOLANT

Nous dormions à dix-huit
Dans un petit appartement
Sans compter l'chiffre de nuit
Qui r'tontissait à tout moment

C'était un peu bancal
Et ça sentait l'arche de Noé
Une ambiance amicale
À faire chanter ohé ohé ohé

Y'avait Bébé Gorille Patoche
Pis Lulu la baquette
Avec Marie Quat' poches,
Chainsaw pis la fée Forniquette

On faisait un peu dur,
Au moins autant que le plancher
On s'cordait mur-à-mur
Quand v'nait l'temps d'nous coucher

Faut dire que nous dormions
Sur un bon vieux tapis volant
On avait des morpions
Des chaudes pisses pis ben du talent

Mais on était heureux
Pis y'avait pas d'SIDA dans l'air
On n'était pas peureux,
On était copulaires

On n'se levait jamais
Ben, ben plus tard qu'midi-et-demi
Fumions quelques pétards
Comme ça joyeusement entre amis
Faisions un p'tit miracle

Pour changer un cours d'eau en vin
Et c'était la débacle sous le tapis divin

Les oiseaux de malheur
N'volaient pas assez haut pour nous
On n'savait même pas l'heure
L'temps nous passait en bas des genoux

Quand on prenait un bain
C'est qu'on traversait un nuage
Comme des chérubins
On n'portait pas notre âge

À chaque mois on avait
La visite du propriétaire
C't'espèce de gros navet
Qui aurait pas dû sortir de terre

De voire ainsi son trou
S'transformer en joyeux bordel
Nous trouvait tellement fou
Et tirait un coup d'aile

Y-avait des trous dins murs
Pour laisser passer les esprits
Dont les venteux murmures
Nous prévenait des intempéries

Quand y-avait des trous d'air
Nous demeurions sagement tapis
Jusqu'à c'qu'on considère
Que c'était des trous dans l'tapis

Alors nous retombâmes
Dans la vie de réalité
Avec des trous dans l'âme
Très loin de l'immortalité

Abimé en nous même
Dans une chute ininterrompue
Faire nos faces de carême
Le charme était romput

Minuit ce fut la rue
Chacun partit de son côté
À tout jamais intrus
Dans toute formes de communautées

Laissant nos utopies
dans les mains du propriétaire
Le cul sur le tapis
Et les pieds d'lières sur terre


16. LES GRANDS MOYENS

Ma femme me tape
Sur un des deux hémisphères
Ma femme me tape
Quand elle se drape avec la nappe

Moi j'm'encourage,
J'veux sauver mon ménage
La ramener dans l'engrenage,
C'est tout c'que j'peux faire

Ma femme dérape
Sur un des deux hémisphères
Ma femme dérape,
Entre les oreilles s'prend pour le pape

Moi qui suis sage
J'ai compris le message
J'engage une bonne pour le ménage,
C'est tout c'que j'peux faire

Quand nous vivions sous le même toit
Ma femme et moi
Avec les chats, les chiens, les oies,
C'était la joie

Un jour nous dûmes quitter la ferme
Pour la grand ville
C'est là que mon pauvre épiderme
Fut moins tranquille

Ma femme se mit à fréquenter
Des clubs sociaux
Sa tête se mit à s'éventer
Comme un vieux scieau

Les musées, les pèlerinages
Et les saisons
De notre modeste ménage
Eurent raison

Ma femme me tape,
Ma femme me tape
Elle me fait sauter la soupape
Ma femme me tape
Quand elle dérape
Quand elle se drape
Avec la nappe

Si je veux sauver mon ménage
Faut pas que je me décourage
Si son pied s'pogne dans l'engrenage
Elle oubliera son personnage

Faudrait que je soigne mon langage,
C'est c'qu'elle me dit
Comme s'il y avait dans mon langage
Une maladie

Ça fait que depuis un bon bout
On s'comprend pas
Pis y'a pus grand chose qui tient debout
On perd le pas

Elle parle d'intellectualiser
Son bagage
Aurait-elle pogné la folie
Des grands voyages?

Comment s'fait-il que nous fussions
Si différent?
J'ai jamais eu d'autres ambitions
Qu'vivre dans mon rang

Ma femme me tape,
Ma femme me tape
Elle me fait sauter les étapes
Ma femme me tape
Quand elle dérape
Quand elle se drape
Avec la nappe

Si je veux sauver mon ménage
Faut pas que je me décourage
Si son pied s'pogne dans l'engrenage
Elle oubliera son personnage

La bonne que j'avais couraillée
Dans la maison
Avec une serviette mouillée
Comme de raison

Au moment où ma tendre
Épouse revenait
Fut priée de remettre sa blouse
Et la monnaie

Mais enfin mon ami comment
Pouvez-vous donc?
Une domestique décidément,
Vous avez le don

D'entretenir des relations
Prolétariennes
En souillant ma réputation
Sur cette vaurienne

Ma femme me tape,
Ma femme me tape
Elle me fait sauter sur la strap
Ma femme me tape quand elle dérape
Quand elle se drape avec la nappe

Si je veux sauver mon ménage
Faut pas que je me décourage
Si son pied s'pogne dans l'engrenage
Elle oubliera son personnage

Vous n'avez aucune classe et puis
Vous m'y forcez
J'ai assez de preuves à l'appui
Pour divorcer

J'pars avec elle, donne-s'y ses gages
Et pis adieu!
Mais enfin mon cher quel langage!
Vous êtes odieux!!

Quand elle a dit c'mot là moé chus
Parti à rire
En lâchant des atomes crochus
Dans mon délire

Et c'est ainsi que j'ai pu piéger
Mon épouse
Qui a fini par prendre son pied
Dans la partouze


17. LES AMOUREUX S'EN VONT

Ils se promènent dans les rues, deux par deux
Têtes en antennes avec du ciel plein les yeux
Nuages en laine

Ils se devinent au-dessus des maisons
Ils se dessinent de nouveaux horizons
Le cœur en plaine

Les amoureux s'en vont
Dans le soleil levant
Un seul regard suffit pour s'inonder
Les pauvres corps n'ont plus qu'à succomber
Dou dou dou dou dou......

Plus le temps passe, plus leur amour grandit
Et c'est l'espace qui bientôt rétrécit
Erreur humaine

Les amoureux sont liés dans la peau
Ils sont heureux avec leur bonheur bien au chaud
Dans les veines

Les amoureux s'en vont
Dans le soleil brûlant
Un seul regard suffit pour s'enflammer
Un seul écart suffit pour éclater

Ils se promènent dans les rues, deux par deux
L'âme sans domaine et de la pluie plein les yeux
Le cœur en peine

Déclin du jour, leur temps s'est écoulé
Et, tour-à-tour, ils ont vu refouler
Leur rêve de laine

Les amoureux s'en vont
Dans le soleil couchant
Dernier regard et les feux sont éteints
Ils se séparent jusqu'au lendemain matin


18. ELLE AVAIT

Pa pa pa pa pa

Elle avait
Un de ces beaux grands sourires olympiques
Des yeux noisettes, des cils longs comme des balais
C'était pas laid!

Elle avait
Des cheveux foncés comme dans les tropiques
Devant moi qui calais comme un sac de lait

J'étais comme un escargot
Fripé comme un vieux mégot
Sans coquille pour s'abriter
Escargoté

Elle avait
Une petite place des plus sympathiques
L'électricité, l'eau chaude, un beau micro-ondes
Des tables rondes

Elle avait
En plus d'étudier en informatique
Une chambre de bains
Et pis ce qui faut pour tout le monde
Spaghetti aux italiens,
Du chili pour les chiliens
Vin français pis vodka russe
Ma belle waitress!

Elle avait
Un oncle qui était dans la politique
Qui magouillait dans les lotissements de terrain
Pis les pots-de-vin

Elle avait
Des idées précises sur l'aérobique
Du parfum cheap, en plus de quelques pierres aux reins
Club sandwich, pizza garnie
Shish-kébab sur lit de riz
Elle avait tout un menu
Welcome-bienvenue!

Elle avait
Comme dessert
J'ai de la tarte aux bleuets, j'ai du pudding chômeur
Du jello pis c'est toute
Ouin ouin c'est toute

Pis au menu nous avons de la
Crème caramel, mousse au chocolat, flanc, ananasse
Vous avez le choix entre un fruit aussi ou un fromage,
Mais c'est une option que vous...


19. UN NERF DANS LA TÊTE

J'ai un nerf dans la tête, un nerf qui me relance
Un petit nerf qui m'embête et trouble mon silence
J'ai un nerf en mémoire, j'ai un nerf qui m'obsède
Qui réclame dans le noir des paroles-remèdes
Qui soignent le mal d'amour dans des phrases insensées
Qui vous font voir le jour quand la nuit est tombée
Qui greffent de la lumière aux taches les plus sombres
Qui initialent l'air dans son écorce d'ombre

J'ai un nerf dans la tête, un nerf qui traîne à l'eau
Qui pique comme une arête pour m'arracher des mots
J'ai un nerf sur la langue qui veut se brancher su le coeur
Et pis qui me harangue pour que je le chante en choeur

Qui me prête des mots que je possède pas moi-même
Pour dire comment c'est beau avec une voix toute blême
Pis nous faire croire que la vie est une serre chaude
Où mousse le rubis sur un tapis d'émeraudes

J'aimerais donc pouvoir trouver le flash qu'il faut
Faire éclater dans le noir comme un vol de corbeaux
Sur un ciel en couleurs où il fait toujours beau
Où jamais la noirceur n'étouffe le flambeau

Quand nous voyageront hors des temps qui nous cernent
Des ailes à nos talons et du vent pleins les cernes
Dans la forêt des mots que je voudrais semer
Pour faire un endroit clos où aller nous cacher


20. LE CHANT DE L'ÉGOUTIER

Je vis dans une ville, je vis sur une île
Coincée dans un océan de banlieues
Je reçois des bills de l'hôtel de ville
Faut ben payer, si on veut chialer mieux!

Qu'est-ce qui va pas dans cette ville-là?
Se demandait le chef de la bourgade
Cette inquiétude de mande une étude
Y faut réanimer la mascarade!

Pourquoi mettre tant de gras dans la parade?
Pour mieux lâcher son tas au-dessus du stade?
Tant qu'à jouer sur les mots avec des phrases toutes faites
(Pour maquiller nos dettes)
Si on changeait la toile pour une toilette?

Gargantua pourrait chier là
Comme les mégalomanes de son engeance
Même qu'y peut ben emmener son chien
On mettra des poteaux en conséquence

De trou du cul, à trou dans rue
Trous dans le budget et trous dans les mémoires
On met des taxes comme des tampax
Pis on plante des petits arbres pour pus rien voir

L'hôtellerie, farce à part, se sent tout triste!
Faut que la ville fasse sa part pour les touristes!
Ce toujours très intrinsèque de faire la bon apôtre
Quand on fait le jars avec le fric des autres
Baissez donc le prix du gaz, des cigarettes
C'est déjà fait! Ou
Patchez les fuites de gaz avant que ça pète!

C'est comme la bière qui se fait la guerre
C'est pas de la publicité qu'on achète
Faites-en une sorte qui est assez forte
Pis arrêtez de nous vendre des étiquettes!

Je vis dans une ville, je vis sur une île
Un vieux volcan qui est plein d'yark! Par en dessous
À voir la mine de note stade en ruine
Y a vraiment de quoi péter plus haut que le trou

Pour qu'une ville soit authentique dans son centre
Pas besoin d'y donner un mal de ventre!
Tant qu'à faire un lavement pour faire surfer les rats
Faites donc le ménage dans le fonctionnariat!
(Cette idée de vouloir prendre le monde pour des bouches-trous
Pour donner aux touristes ce qu'ils voient partout
Cette idée de toujours prendre le monde des bouches-trous
On est un peu touristes nous autres itou...)
1992, quel été de cul


21. PLASTIQUEMENT VÔTRE!

C'était un mannequin superbe,
Une magnifique poupée imberbe
Devant ses grands yeux langoureux,
Comment ne pas être amoureux?
Avait la peau lisse et luisante,
Le look parfait, la hanche bombée
La lippe gonflée, la dent brillante
Et des seins pas faits pour tomber

Mon amour devint élastique
Devant cette beauté plastique
Me mis à lui offrir des fleurs (en plastique)
Qui gardent toujours leurs couleurs
Mais, elle, malgré toute mon ampleur
Demeurait raide comme une fourchette (en plastique)
Celle que j'aimais sans cachette
Voulait peut-être que j'achète
Un petit émergent doré? (en plastique)
Je me mis à mal digérer, à l'estomac fut opéré
Me retrouvai avec un sac (en plastique)
Que l'on suspend comme un hamac
Mais qui n'est rien d'autre qu'un cul-de-sac
Bientôt, on me mettra des tubes (en plastique)
Je sens mon amour qui titube,
Il se peut même qu'on m'incube
Pour mouler ma tendresse en cubes (en plastique)
Et on en vendra à la ronde
Pour que toutes les poupées blondes
Aient le sentiment de construire un monde (en plastique)
Et on en vendra à la ronde
Pour que toutes les poupées du monde
Aient l'imagination féconde


22. LES SOLEILS COUCHANTS

Variation sur les soleils couchants, de Verlaine

Une aube affaiblit, berce par les champs
La mélancolie, des soleils couchants
La mélancolie verse de doux chants
Mon cœur qui s'oublie aux soleils couchants

Et d'étranges rêves, comme des soleils
Couchant sur les grèves, fantômes vermeille
Défile sans trèves défile pareil
À de grands soleils couchants sur des grèves

Veut tout arranger selon son loisir
Me fait m'alonger pour son bon plaisir
Et me fait manger tout ce qu'elle désire
J'affronte les dangers, elle n'a qu'à choisir

Je gobe tout pour elle des mots du cognac
Des pipites à elle et tout l'bric-à-brac
Des verres des sauterelles j'en ai plein mon sac
Si je mange mes semelles, elle mangera mes claques

Si'l est une maîtresse, à imaginer
Celles dont les caresses restent à deviner
C'est cette maîtresse aux doigt aux doigt satinés
De celle qui tresse notre destinée

Et l'on vient vers elles sans qu'elles nous racolent
Cette demoiselle qui pose des colles
Nous donne des ailes quand elle caracole
Mademoiselle Giselle la maîtresse d'école


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