François Beranger : Joue Pas avec Mes Nerfs

Folk Rock / France
(1979 - L'Escargot)
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Les paroles

FACE 1


1. CHANSONS MARRANTES

J’aimerais faire des chansons marrantes
Faire rigoler ceux qu’ont payé
Vous dire que le monde est beau
Malgré quelques petits accrocs
Que je reviens d’Californie
La tête pleine de rainbows
Vous faire des big bizous partout
Vous faire des big bizous partout

J’aimerais faire des chansons marrantes
Pour que s’écroulent sous leur bureau
Tous les programmateurs-radio
Qui me prennent pour vieil agri
Un emmerdeur un malpoli
Qui ne vient jamais faire sa cour
Qui ne donne jamais de p’tits cadeaux
Qui ne donne jamais de p’tits cadeaux

J’aimerais faire des chansons marrantes
Pour celui-là qui a écrit
« Béranger c’est de la broutille
Faut quand même pas s’foutre de ma bille
Y raconte toujours la même chose
Dans l’show-bize faut se renouveler »
Car bien sûr comme vous le savez
Le monde a vraiment changé

J’aimerais faire des chansons marrantes
Sortir mon disque tous les ans
Car la chanson c’est un marché
Comme la lessive ou les idées
Faut fournir aux consommateurs
Un beau produit bien emballé
Et surtout pas - comme je le fais -
Surtout pas dans la soupe cracher

J’aimerais faire des chansons marrantes
Un peu d’rétro - un peu de d’isco
Un peu de cœur - un peu de fesse
D’la bonne humeur à toute épreuve
Des œillères en acier trempé
Des musiques complètement carrées
Mais je n’sais pas c’que j’ai j’peux pas
Mais je n’sais pas c’que j’ai j’peux pas

J’aimerais faire des chansons marrantes
Faire péter les sous-ventrières
Mais j’ai rien à dire de marrant
La France est une morne grisaille
Si vraiment c’est impératif
Plutôt que de m’arracher les tifs
Il faudrait mieux c’est pas un monde
Que j’la ferme pour de bon ma gueule

La la la la chansons marrantes
La la la la la la la la
La la la le monde est beau
La la la la la la la la
La je reviens de Californie
La tête pleine de rainbows
J’vous fais des big bizous partout
J’vous fais des big bizous partout


2. MAMADOU M’A DIT

Mamadou m’a dit
Mamadou m’a dit
On a pressé le citron
On peut jeter la peau

Les citrons c’est les négros,
Tous les négros d’Afrique
Sénégal, Mauritanie,
Haute-volta, Togo, Mali,
Côte d’Ivoire et Guinée,
Bénin, Maroc, Algérie,
Cameroun et tutti quanti

(Chorus)
Les colons sont partis avec des flonflons
Des discours solennels, des bénédictions
Chaque peuple c’est normal dispose de lui-même
Et doit s’épanouir dans l’harmonie
Une fois qu’on l’a saigné aux quatre veines
Qu’on l’a bien ratissé et qu’on lui a tout pris

Les colons sont partis
Ils ont mis à leur place
Une nouvelle élite
De noirs bien blanchis
Le monde blanc rigole
Les nouveaux c’est bizarre
Sont pires que les anciens
C’est sûrement un hasard

Le monde blanc rigole quand un petit sergent
Se fait sacrer empereur avec mille glorioles
Après tout c’est pas grave du moment que les terres
Produisent pour les blancs ce qui est nécessaire
Le coton, l’arachide, le sucre, le cacao
Remplissent les bateaux saturent les entrepôts

(Chorus)

Après tout c’est pas grave
Les colons sont partis
Que l’Afrique se démerde
Que les paysans crèvent
Les colons sont partis
Avec dans leurs bagages
Quelques bateaux d’esclaves
Pour pas perdre la main

Quelques bateaux d’esclaves pour balayer les rues
Ils se ressemblent tous avec leur passe-montagne
Ils ont froid à la peau et encore plus au cœur
Là-bas c’est la famine et ici la misère
Et comme il faut parfois manger et puis dormir
Dans les foyers-taudis ont vit dans le sordide

(Chorus)

Et puis un jour la « Crise »
Nous envahit aussi
Qu’on les renvoie chez eux
Ils seront plus heureux
Qu’on leur donne un pourboire
Faut être libéral
Et quant à ceux qui râlent
Un bon coup de pied au cul

Vous comprenez monsieur c’est quand même pas normal
Ils nous bouffent notre pain, il reluquent nos femmes
Qu’ils retournent faire les singes dans leurs cocotiers
Tous nos bons nègres à nous qu’on a si bien soignés
Et puis c’qui est certain c’est qu’un rien les amuse
Ils sont toujours à rire ce sont de vrais gamins

(Chorus)


3. JE NE VEUX PLUS SAVOIR

(Chorus)
Je ne sais pas qui tu es
Je ne sais pas d’où tu viens
Et je ne veux plus le savoir

Je ne sais pas qui vous êtes jeunes flics arrogants
Rencontrés l’autre soir sur le quai d’une gare
Pareils à vos semblables sorties du même moule
Moulés de suffisance bardés dans la bêtise
Je me disais hier dans un rêve utopique
Sous l’uniforme bleue sous la visière plastique
Derrière le bouclier à l’autre bout du flingue
C’est pas un chien qu’il y a mais quand même un bonhomme

(Chorus)

Citoyens citoyennes alignement par quatre
On veut voir qu’une tête pas un mot dans les rangs
Les suspects au ballon les chevelus fichés
Les gonzesses des salopes les motards des anars
Les cocos à Moscou les bougnoules dans la Seine
Les nègres au cocotier les pédés à châtrer
Et toi ta mobylette où c’est que tu l’as piquée
Espèce de parasite tu ferais mieux de travailler

(Chorus)

Jeunes flics arrogants rencontrés l’autre soir
A onze heures dans l’métro sur le quai d’une gare
Vous étiez quatre en ligne débouchant d’un couloir
Avec la belle prestance que donne le pouvoir
Sur le quai y’avait moi j’ai pas l’air trop suspect
Et un autre bronzé du genre qu’on déracine
Pour ramasser nos merdes et qu’on paie à moitié
Les flics bien rôdés ne voient que le faciès

(Chorus)

Tes papiers rigolo pas encore au dodo
L’homme sort de sa poche un portefeuille noir
Où sont tous ses papiers les sacro-saints papelards
Passeport d’étranger carte d’identité
Carte pour travailler carte pour séjourner
Carte pour respirer carte pour exister
D’un air dégouté un des flics prend l’paquet
Et passe à son voisin sans même regarder

(Chorus)

Et puis il faut bien rire dans ce dur métier
Le plus marrant des quatre prend le portefeuille
Et répand sur le quai dégueulasse et souillé
Les photos et les lettres trésors de l’émigré
Sans un regard sans un mot le type s’accroupit
Une main chaleureuse le renverse sur le cul
Quatre rires maladifs résonnent dans la gare
Et les robots s’en vont vers d’autres héroïsmes

(Chorus)

Pour flic blessé pour un flic tué
Branle-bas de combat l’ordre est menacé
Alerte générale obsèques nationales
Restaurons les valeurs ça ne peut plus durer
Pour mille mecs humiliés en toute impunité
Combien d’lignes de journaux d’scoop de télé
Combien de numéros d’officiels courroucés
Je me penche je dégueule j’ai envie de tout casser

(Chorus)


FACE 2

1. JOUE PAS AVEC MES NERFS

(Chorus)
Joue pas avec mes nerfs
J’ai un flip de travers
Une arête dans l’gosier
Je n’peux plus respirer
Plein de trucs me sidèrent
J’ai beau dire j’ai beau faire
Parfois je me réveille
Et je m’dis pourquoi faire

Le vieux monde s’essouffle
Il court après sa queue
Il pédale dans l’yaourt
Se noie dans la choucroute
Le Shah se fait chasser
Il part en pleurnichant
Avec des milliards
Ramassés dans le sang

On aurait dû le pendre
A un croc de boucher
Le Shah se fait virer
Par un vieux puritain

Sorti du moyen-âge
Lançant des anathèmes
Planqué près de Paris
Et le bon peuple l’aime

Le rêve communiste
Pourrit dans les goulags
Le rêve d’Israël
Est mort dans la haine
Des jeunes gens par milliers
Se tournent vers le chimique
Le rêve hypodermique
Nous kidnappe les meilleurs

(Chorus)

Je regarde ébahi
Le grosse face bouffie
D’un de nos dirigeants
Qui remplit tout l’écran
On dit qu’à quarante ans
Un visage dit tout
Ce que j’vois sur le sien
Me donne des boutons

Il est content de lui
Tout va bien c’est la joie
Ceux qui grognent ceux qui rognent
Sont des mauvais esprits

A l’Est rien de nouveau
Les villes de Lorraine
Deviennent villes mortes
Pourrissant de colère

Les cheminées qui fument
Passent au rang des souvenirs
Les chômeurs désoeuvrés
Vont parfois s’balader
Devant les grilles fermées
A l’ombre des terrils
Les milliards sont partis
Là où c’est beaucoup plus rentables

(Chorus)

Je regarde une photo
Du ghetto d’Varsovie
Un p’tit môme en casquette
Lève les bras bien haut
Derrière lui un nazi
Satisfait sûr de lui
Lui braque dans le dos
Son flingue indifférent

Le visage de l’enfant
C’est la terreur du monde
L’innocence violée
L’humanité bafouée

La gueule du pourri
C’est l’abus du pouvoir
L’éternelle saloperie
Tout pouvoir est maudit

J’pourrais être l’enfant
J’pourrais être le nazi
Quel est le dieu vicieux
Bien planqué dans les cieux
Qui décide de tout ça
Qu’on lui tire la barbe
Qu’on lui crève les yeux
Qu’on le balance au néant

(Chorus)

Un jour ça prévient pas
On se réveille vieux
On se réveille vide
Des rides autour des yeux
Des sanglots pleins la gorge
Qui pèsent comme des pierres
Un jour ça prévient pas
On se retrouve seul

Les amours sont parties
On a pas su aimer
On en voulait plusieurs
On en a plus aucune

Il faut n’en aimer qu’une
Et choisir ou partir
On a l’amour bizarre
On sait pas l’exprimer

Les voisins s’font la guerre
Et ne parlent pas
Au sous-sol c’est l’négro
Au premier c’est l’catho
Au second c’est l’Coco
Au troisième c’est l’P.R.
Au dernier c’est l’pédé
On est tous à enfermer

(Chorus)

Y’a toujours des malsains
Quelles que soient les époques
Pour se dire nom d’un chien
Qu’est-ce que c’est c’te galère
Y’a toujours un malin
Pour ramener sa gueule
Pour penser pour chanter
Que tout le désespère

Que vraiment ça va mal
Que c’est l’époque-charnière
Qu’après ça rien n’va plus
Que personne n’en peut plus

Pourtant ça continue
C’est ça qu’est fantastique
Ça fait des millénaires
Qu’on respire le même air

Qu’on se tire dessus
Comme des élastiques
Que ça naît que ça meurt
Que ça crie de douleur
Et nous là-dedans on vit
On s’salue on sourit
On n’est pas des bestiaux
Non le monde est vraiment beau

(Chorus)


2. POUR MA GRAND-MERE (ET J.P.C.)

Ma grand-mère qu’était de Clamecy
Elle a clamsé dans p’tit lit
A l’hôpital de Montargis
Elle est partie rejoindre son homme
Celui qu’elle appelait son chéri
Un matin d’cet hiver pourri

Ma grand-mère qu’était de Clamecy
C’était une qui chantait tout le temps
Au temps d’son jeune temps à vingt-ans
Faut dire qu’elle était couturière
Et qu’dans les ateliers de misère
On se serait cru dans une volière

Dans les quartiers des ateliers
Des ateliers de couturière
Fallait voir comme la dernière
Était sapée comme une rentière
On sait pas comment qu’elles faisaient
Pour être mises comme des princesses

Quand ça sortait des ateliers
Après dix-onze heures de travail
Les rues s’emplissaient de beautés
Les chapeautières, les culottières,
Les grisettes, les trottins,
Les petites mains et les premières

Sous leurs belles robes et leurs faux-culs
Sous leurs jabots, leurs redingotes,
Sous leurs chignons comme des châteaux
Sous leur frou-frou à quatre sous
Y’avaient leur chair de jeunesse
Déjà marquée par la galère

L’élégance de la ville lumière
C’est pas les riches qui l’on faite
D’ailleurs les riches c’est bien connu
Ça s’amène avec son pognon
D’un geste rond ça sort ses ronds
Ça paie la sueur et les douze heures

Douze heures par jour, six jours de rand
Les fesses talées, les reins brisés
La poitrine creuse, les doigts piqués
Les yeux rougis et ça chantait
Ça chantait des chansons joyeuses
D’avenir radieux d’amour toujours

Les p’tites nanas de ce temps-là
Elles tenaient très haut à bout de bras
Une sorte de fierté orgueilleuse
C’était mieux que d’chercher l’oubli
Après des journées pas fameuses
Dans des verres d’absinthe ou d’anis

Pour ma grand-mère qu’était de Clamecy
Qui vient de clamser dans son p’tit lit
Pour elle qu’a chanté toute sa vie
En guise d’au revoir et merci
Cette chansonnette je dédie
Un jour de cet hiver pourri


3. TOUS CES MILLIERS DE KILOMETRES

(Chorus)
Tous ces milliers de kilomètres
Toutes ces routes parcourues
Tous ces visages dans la pénombre
Tous ces visages d’inconnus

Pour nous partir n’est plus partir
On a sa maison dans sa tête
Le paysage faut qu’il défile
Derrière les vitres d’une bagnole
On ne s’arrête pas plus d’un soir
De peur de prendre racine

(Chorus)

Tous ces visages qui ne font qu’un
Et qu’on finit par bien connaître
S’ils sont venus c’est qu’il faut croire
Qu’on a quelque chose en commun
Qu’on est pareils ni plus ni moins
Qu’ils viennent entendre leur propre chant

(Chorus)

Les gens qui viennent sont comme des portes
Les unes ouvertes les autres fermées
Les uns viennent pour juger
Avec des critères plein la tête
Les autres viennent pour aimer
Comme on va à une fête

(Chorus)

Moi ça m’rend meilleur de chanter
Ça me libère ma tendresse
Je chante pour ce visage fervent
Entrevu l’espace d’une instant
Quelque part, je ne sais où
Quelque part, je ne sais quand

(Chorus)


4. A FORCE

(Chorus)
Sur nos pattes de derrière
Nous irons faire le beau
Présentant nos papiers
Dès que passe un corbeau
L’ombre d’une casquette
Le vol d’un perdreau

A force de contrôle
A force de patrouilles
A force de fouilles
De flics qui te jaugent
Te juges te transpercent
Te toisent te suspectent
Te fichent te classes
Te statistiques

(Chorus)

Le jour et la nuit
Partout où l’on vit
Dans les rues, sur les routes
Partout où l’on va
On finira un jour
Par être ce qu’ils veulent
Des moutons numéros
Qui ferment bien leur gueule

(Chorus)


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